vendredi 8 septembre 2017

Analyse des ordonnances Macron - 2/4 - Ordonnance relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail

  • Barémisation

Concernant les indemnités versées en cas de licenciement sans cause réelle ni sérieuse :

Dans les entreprises de plus de 11 salariés 

Salariés ayant une ancienneté de moins de 2 ans 
Avant les ordonnances pas de minima et pas de plafond maximum 
Après les ordonnances : Le minima varie de 0 pour moins d’un an d’ancienneté à un mois maximum. Le minima varie de un mois minimum pour plus d’un an d’ancienneté à deux mois maximum.

Salariés ayant une ancienneté de plus de 2 ans 
Avant les ordonnances : plancher minimal de 6 mois de salaire brut, pas de plafond maximum 
Après les ordonnances : 3 mois minimum et maximum pour 2 ans d’ancienneté. Minima de 3 mois et jusqu’à 20 mois maximum pour plus de 30 ans d’ancienneté.

Dans les entreprises de moins de 11 salariés   

Avant les ordonnances : pour tous les salariés, pas de minima pas de maxima 
Après les ordonnances Salariés ayant moins d’un d’ancienneté : 0 mois. Salariés ayant 10 ans d’ancienneté : minimum et maximum de 2,5 mois. Salariés ayant une ancienneté à partir de 11 ans : barème identique aux entreprises de plus de 11 salariés 

En cas de nullité du licenciement   

Avant les ordonnances : 12 mois d’indemnités minimum
Après les ordonnances : 6 mois d’indemnités minimum  



Exemple : en cas de licenciement d’une femme enceinte qui refuse sa réintégration, celle-ci ne touchera que 6 mois d’indemnités au lieu des 12 mois avant les ordonnances !

Autres exemples sur le plafonnement des indemnités pour licenciement illégal
L’ordonnance fixe un minimum et un maximum du montant de l’indemnisation.
Une femme ingénieure de 55 ans percevant un salaire mensuel brut de 5 000 € et ayant 10 ans d’ancienneté est licenciée abusivement par son employeur. Le montant d’indemnisation auquel elle peut prétendre se situe entre 3 mois minimum ou 10 mois maximum de salaire. Le montant de son indemnisation peut donc être de 15 000 € (5 000 € x 3).
Pour la remplacer, l’employeur embauchera un jeune ingénieur à 2 000 € par mois, en 7 mois et demi (15 000 € : 2 000 €) la différence de salaire rend rentable le licenciement. L’employeur sera « indemnisé » de sa condamnation pour licenciement abusif. C’est le licenciement low cost. Ce n’est pas un encouragement à embaucher mais une incitation à licencier et à tirer vers le bas les salaires.

  • Procédure de licenciement
Un décret va publier un modèle type de notification de licenciement, autrement dit l’employeur disposera d’un document le sécurisant, avec des mentions obligatoires figurant dans le modèle qu’il n’aura qu’à compléter.

Actuellement le défaut de motivation est considéré comme un vice de fond de la procédure qui prive le licenciement de cause réelle et sérieuse entraînant une indemnité pour le salarié d’un minimum de 6 mois de salaire. En outre, aujourd’hui les motifs figurant dans la lettre de licenciement ne peuvent plus être modifiés par l’employeur.

Pour rappel l’obligation, pour l’employeur, de motiver le licenciement et de respecter une procédure date de 1973, encore un recul de plusieurs dizaines d’années.

Avec l’ordonnance, les motifs du licenciement peuvent, après la lettre de licenciement ou du modèle type, être précisés ou complétés, soit par l’employeur, soit à la demande du salarié. Le salarié devrait donc signaler (aux dires du gouvernement dans les 15 jours de la notification) à son employeur l’irrégularité liée à la motivation ! 
Mais surtout, si l’employeur a mal motivé la lettre de licenciement cela n’entraînera qu’une indemnité d’un montant maximum d’un mois.

L’ordonnance permet à l’employeur de se passer de motivation dans la lettre de licenciement ou de modifier les motifs, y compris jusque devant le juge en cas de contestation, puis que la peine encourue sera minime et non dissuasive. Et le salarié aura bien du mal à présenter sa défense si les motifs de son licenciement ne lui ont pas été communiqués avant qu’il ne saisisse le juge.

De plus, l’obligation de transmettre un CDD écrit au salarié est mis à mal. Le défaut de transmission du CDD écrit dans les délais légaux n’entraînera plus la requalification des CDD en CDI. Le non-respect de cette obligation ne pourra entraîner, au plus, qu’à une indemnité d’un mois de salaire.

  • Délais de contestation des ruptures
Tous les délais de recours portant sur la rupture du contrat de travail sont ramenés à 12 mois.
  • Plans de départs volontaires
L’ordonnance vise ici à écarter toutes les règles du licenciement économique collectif en cas de plan de départs volontaires, et notamment de permettre à l’employeur de se soustraire à la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi.

Ainsi, les critères d’ordre de licenciement, le plan de reclassement, l’obligation de recherche de reclassement, la priorité de réembauche, les indemnités de départ du plan de sauvegarde de l’emploi, la procédure de consultation des institutions représentatives du personnel ne sont pas applicables, l’employeur n’est pas tenu de s’y soumettre. L’accord collectif doit prévoir quelques règles mais a minima, il ne sera pas nécessaire que les mesures soient proportionnées aux moyens de l’entreprise ou du groupe.
  • Périmètre licenciement économique
Quand l’entreprise appartient à un groupe, les difficultés économiques seront appréciées au niveau du secteur d’activité et des entreprises du groupe appartenant au même secteur, établies sur le territoire national. Autrement dit, les juges, pour déterminer si les licenciements étaient justifiés, n’auront plus à regarder la situation économique des toutes les entreprises appartenant au même secteur d’activité, ils ne regarderont plus que les entreprises situées en France.

  • Reclassement licenciement économique 
L’employeur n’aura plus l’obligation de proposer les postes de reclassement à chaque salarié de manière personnalisée. Les ordonnances l’autorisent à transmettre les offres d’emploi par tout moyen. Autrement dit, un employeur pourra se contenter de mettre à disposition une liste de postes disponibles sur l’intranet de l’entreprise, ou sur un panneau d’affichage.

  • Transfert des contrats de travail
Dans le prolongement de la loi travail El Khomri, le gouvernement cherche à faire obstacle aux transferts des contrats de travail. Désormais, dans toutes les entreprises, y compris celles de moins de 1000 salariés, une entreprise pourra licencier les salariés avant de revendre l’entreprise, ce qui n’était pas possible avant : le repreneur devait reprendre tous les salariés sans les licencier, sauf s’il avait lui-même des difficultés économiques.

  • CDI de chantier
Actuellement, certaines branches, telles que le BTP ou SYNTHEC, peuvent conclure des CDI de chantier, parce que cela est « d’usage » dans leur profession. Un CDI de chantier est un contrat qui prend fin dès lors que la tâche pour laquelle le salarié est embauché est terminée.

Désormais, toutes les branches quelle que soit leur activité pourront prévoir par accord collectif étendu la possibilité, pour les entreprises couvertes par l’accord, de conclure des contrats de chantier.

Pour les secteurs où l’usage du contrat de chantier est habituel et conforme à l’exercice régulier de la profession, il ne sera pas nécessaire qu’il existe un accord collectif étendu, pour que les entreprises puissent conclure un tel contrat.

La loi n’encadre pas du tout ces contrats de chantier et renvoie à l’accord collectif la détermination des motifs de recours, de la taille des entreprises concernées, des activités concernées, des contreparties en cas de licenciement, de la rémunération…

Il sera désormais possible de prévoir un CDI de chantier non pas pour la durée du chantier, mais seulement pour effectuer des tâches précises. A la fin des tâches définies dans le contrat, le salarié sera licencié et le licenciement aura une cause réelle et sérieuse.

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