- Primauté de l’accord d’entreprise et bloc de compétence réservé à la branche
L’accord
d’entreprise prévaut sur la branche
Le projet d’ordonnance
poursuit et généralise « l’inversion de la hiérarchie des normes » commencé par
la loi El Khomri en faisant prévaloir l’accord d’entreprise sur l’accord de
branche. Ainsi dans la plupart des domaines du code du travail l’accord
d’entreprise peut déroger à l’accord de branche de façon défavorable.
Ce principe comporte des
exceptions sur certains sujets réservés à la branche.
Pas d’exception liée à la
date des accords d’entreprise ou de branche
Dans tous les domaines
qui ne relèvent pas du domaine exclusif de la branche ou de sujets verrouillés
par la branche, les dispositions défavorables des accords d’entreprise
prévalent sur les accords de branche, quelle que soit la date de l’accord
d’entreprise. Ainsi les accords d’entreprise peuvent déroger également aux
accords de branche conclus avant le 6 mai 2004.
Rapports entre la branche
et la loi
Concernant les rapports
entre la loi et la branche, cette dernière peut déroger de façon défavorable
aux règles légales sauf lorsque celles-ci sont d’ordre public. Pour savoir
quelles règles sont d’ordre public, il faudra se reporter aux règles du code du
travail en question (dans la version du code du travail issue des ordonnances).
Exemple : pour les CDD,
les dispositions légales prévoient que la branche peut fixer elle même la durée
du CDD, le nombre de renouvellement et le délai de carence entre deux CDD. Ce
n’est qu’à défaut d’accord de branche que les limites prévues par la loi sont
applicables. Ainsi, dans ces
domaines une convention de branche peut prévoir des dispositions moins
favorables que la loi (ex. : un CDD de 2 ans renouvelable 4 fois sans délai de
carence).
Le même principe
s’applique aux rapports entre les accords d’entreprise et la loi. Ceux-ci
peuvent déroger de façon défavorable à la loi sauf dispositions légales d’ordre
public
- Primauté de l’accord d’entreprise sur le contrat de travail
L’ordonnance prévoit que
certains accords collectifs pourront modifier le contrat de travail du salarié
sans son accord. C’est la fin du principe de faveur, selon lequel entre deux
clauses (une issue de l’accord collectif et l’autre du contrat de travail),
c’est la plus favorable qui prévaut.
C’est valable pour tous
les accords collectifs qui sont conclus en vue de préserver, ou de développer
l’emploi, ou qui répondent aux nécessités liées au fonctionnement de
l’entreprise. Autant dire que tous les accords d’entreprise sont susceptibles
de rentrer dans ces critères ! Et que ces accords pourront remplacer des plans
de sauvegarde de l’emploi !
Cet accord d’entreprise pourra porter sur :
- L'aménagement de la durée du travail, ses modalités d’organisation et de répartition,
- La rémunération de base et tout autre avantages ou accessoires du salaire,
- La mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise.
Si le salarié refuse la
modification de son contrat de travail, son licenciement repose automatiquement
sur une cause réelle et sérieuse.
OUF, le gouvernement a tout de même prévu que
le salarié aurait droit aux allocations chômage… Unique et ridicule contrepartie
à ce licenciement : l’employeur devra abonder le compte personnel de formation
selon des modalités à déterminer par décret (100 heures selon les annonces du
gouvernement)
- Le délai de l’action en nullité contre un accord collectif sera très court :
Toute action en nullité
de tout ou partie d’une convention ou d’un accord doit être engagée sous peine
d’irrecevabilité dans un délai de deux mois à compter de la notification
ou de la publication.
Le juge peut décider que
l’annulation ne vaut que pour l’avenir et n’est pas rétroactif.
Les accords collectifs en
lien avec des licenciements collectifs pour motif économique ou un plan de
sauvegarde de l’emploi gardent leurs spécificités.
- Négociation en l’absence de délégués syndicaux dans l’entreprise
L’ordonnance modifie les
règles de négociation en entreprise en l’absence de délégués syndicaux.
- Les entreprises de moins de 50 salariés pourront désormais négocier sans délégués syndicaux sur tous les sujets ouverts à la négociation (avant c’était sur certains points uniquement).
- Dans les entreprises de moins de 11 salariés, l’employeur pourra directement procéder à un référendum auprès des salariés pour faire valider un projet d’accord collectif. Dans une entreprise d’une si petite taille, on imagine à quel point le secret du vote peut être respecté !
- Dans les autres entreprises, les règles divergent un peu en fonction de leur taille, mais l’idée globale est la même : ce sera soit des membres élus du conseil social et économique (CSE) qui pourront négocier (mandatés ou non par une organisation syndicale), l’accord sera alors valide si les membres du CSE signataires représentent la majorité des suffrages exprimés aux dernières élections professionnelles.
En l’absence de membres
élus du CSE, ou si ces derniers n’ont pas souhaité négocier, ce sera alors des
salariés mandatés suivi d’un référendum dans l’entreprise.
On est donc bien loin des accords signés par des syndicats
majoritaires ! Tout est bon pour obtenir des accords d’entreprise qui pourront
déroger aux accords de branche !
- Référendum à l’initiative de l’employeur
Contenu de la loi travail
El Khomri :
Lorsque qu’un accord
d’entreprise ou d’établissement a été signé par des organisations syndicales
représentatives minoritaires ayant recueillies plus de 30% des suffrages.
Celles-ci disposent d’un délai d’un mois à compter de cette signature pour
manifester leur intention de procéder à un referendum des salariés pour valider
l’accord.
Rajout de l’ordonnance :
Au terme de ce délai d’un
mois, l’employeur peut organiser ce referendum à moins que l’ensemble des
organisations signataires qui ont signés ne s’y oppose.
POUR CONCLURE
Cette ordonnance poursuit donc le travail entamé dans la loi El Khomri dans l'inversion de la hiérarchie des normes et enfonce le clou en mettant fin au principe de faveur.
Les motifs de licenciement se verront simplifiés et les recours raccourcis.
Enfin, comme nous le verrons dans l'analyse de l'ordonnance relative au dialogue social, la négociation exclura la possibilité de recourir aux délégués syndicaux.
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